En cette période de crise majeure, nombre de salariés sont brutalement privés de salaire ou confrontés à une cessation brutale d’activité (ex. hospitalisation ou décès du gérant), sans qu’aucune procédure de licenciement, ni procédure collective n’aient été mises en oeuvre.

Ordinairement, ils peuvent saisir en urgence le Conseil de Prud’hommes (CPH) aux fins d’obtenir la condamnation de l’employeur au versement de leur rémunération. Cette action est exercée « en référé », en raison de l’urgence liée à la privation de salaire. Le non-versement de celui-ci peut également permettre de prendre acte de la rupture du contrat de travail. L’employeur s’expose en outre à une contravention de 3ème classe et au paiement d’une amende de 450 €. Si le ministère de la Justice a annoncé que les procédures urgentes seraient toujours possibles, tel n’est pas le cas dans la pratique.

Prud’hommes à distance : un impossible parcours du combattant

Afin de permettre une continuité de l’activité, l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 a provisoirement assoupli certaines exigences formelles inhérentes à la procédure prud’homale : possibilité d’organiser les audiences en visioconférence ou conférence téléphonique, recours à une procédure sans audience ou encore recours à une formation de jugement restreinte (un conseiller salarié et un conseiller employeur).
Depuis mi-mars 2020, la mise en oeuvre de ces référés s’avère quasiment impossible, la plupart des juridictions prud’homales sont fermées, aucun accueil physique n’étant assuré. La voie de la saisine dématérialisée s’avère impraticable et, faute de pouvoir joindre un accueil téléphonique, il est impossible de s’assurer de la réception effective des recours adressés par voie postale.
Nombreuses sont ainsi les juridictions qui n’ont d’autre choix que d’annoncer « l’audiencement des dossiers à la fin du confinement »…

Privation de revenu : « grande urgence », négociation et médiation

Nul ne peut contester qu’une privation de revenu soit une urgence vitale. Conscientes de la situation, certaines juridictions (CPH de Saint-Germain en Laye, de Poissy, …) permettent de soumettre à l’appréciation des chefs de juridiction les requêtes en « référés de grande urgence ». Cette saisine peut s’effectuer par voie électronique.
Dans ce contexte, nous privilégions d’abord la négociation directe. Lorsque celle-ci échoue, les situations sont instruites pour établir cette « grande urgence » et obtenir une date d’audience à distance.
Malheureusement, les calendriers des CPH seront encore plus surchargés après la crise. Toutes les réponses alternatives doivent donc être privilégiées. À cette fin, nous soutenons l’idée d’un recours massif à la médiation dans le contentieux social (3 mois maximum pour trouver une solution mutuellement acceptable).

Les juridictions prud’homales sont à l’arrêt. La privation de revenus doit être considérée comme une situation de « grande urgence », permettant la fixation d’audiences à distance. Sans attendre la reprise d’un fonctionnement déjà difficile, un recours massif à la médiation judiciaire s’impose en droit social.